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Le marché de l’occasion en ligne : de plus en plus attractif
7 octobre 2020

L’avenir des détaillants en France est de plus en plus incertain. Les crises économiques, sanitaires, écologiques et sociales les ont fragilisés. Par conséquent, nombreuses sont les enseignes ayant été placées en redressement judiciaire ces derniers mois. Parallèlement, dans le secteur du prêt-à-porter, les consommateurs ont tendance à réduire leurs achats neufs et s’orientent davantage vers des collections éco-responsables (Xerfi, 2020). De ce fait, le marché de l’occasion est en forte croissance. Côté mode, il augmente même plus vite que celui du neuf. La valeur du marché se déplace aussi vers les plateformes en ligne (Xerfi Percepta, 2019). Cet engouement pour ce marché se remarque à travers les réussites de ses acteurs : Vinted, leboncoin…

Une économie linéaire à bout de souffle

Notre économie actuelle tourne principalement autour d’un système économique linéaire, qui consiste à “extraire, fabriquer, utiliser puis jeter”. Nous devons cependant faire face à une prise de conscience : la planète a ses limites et elles tendent à être atteintes incessamment sous peu. Par conséquent, notre économie linéaire se dirige vers une voie sans issue. De plus, d’après une étude de World Economic Forum, en conservant ce rythme de consommation, en 2050, l’océan compterait davantage de plastiques que de poissons.

Le textile, un secteur d’activité extrêmement polluant

Le textile est le troisième secteur d’activité consommant le plus d’eau dans le monde après la culture de blé et de riz. “La mode sans dessus-dessous” est une excellente infographie qui illustre les impacts environnementaux et sociaux provoqués par la fast-fashion. Une étude de McKinsey affirme que les consommateurs conservent de moins en moins longtemps leurs vêtements. Trois cinquièmes de ces derniers finissent dans des décharges ou des incinérateurs seulement quelques années après leur production. Ces faits sont dramatiques.

De nouveaux modes de consommation émergent

Les Français y sont de plus en plus sensibilisés et certains décident de consommer en faveur de la planète. Ils se tournent donc vers un modèle de consommation circulaire et laissent de côté le modèle traditionnel, considéré comme obsolète et nocif pour la planète. De nouveaux modes de consommations émergent alors : la location, l’achat d’occasion, l’achat en circuit court, la réparation d’objets, l’achat d’objets reconditionnés, le partage collaboratif, le recyclage, le troc… (Xerfi 2019). De plus en plus, les consommateurs sont lassés de la course effrénée à l’achat et du renouvellement incessant des objets du fait de l’obsolescence programmée. Aujourd’hui, le modèle de l’hyperconsommation n’est plus forcément source de “satisfaction” et de “bonheur”. Une vision alternative est en train d’émerger, laissant place à une consommation plus raisonnée.

Un marché de l’occasion en croissance face au marché du neuf

Le marché de l’occasion en ligne connaît une forte croissance ces dernières années : hors véhicules d’occasion, il était de 7 milliards d’euros en 2018. La crise de 2008 a engendré un développement rapide du marché de l’occasion au détriment du marché du neuf (Xerfi, 2019). Le marché est partagé entre les acteurs “physiques” (les brocantes, les antiquaires, les enseignes d’achat vente) et les acteurs “virtuels” (les sites d’annonces et places de marché). Malgré une croissance des acteurs physiques, le chiffre d’affaires du e-commerce ne cesse d’augmenter et progresse de 13,4% entre 2017 et 2018 (FEVAD, 2018). Le marché de l’occasion en ligne connaît alors une forte croissance ces dernières années : +13% de progression du chiffre d’affaires en 2018 par rapport à 2017.

Les freins et les motivations propres au marché de l’occasion

Les motivations des consommateurs vis-à-vis du marché de l’occasion

Les consommateurs de biens d’occasion sont hétérogènes : leurs différentes motivations peuvent être contradictoires. En effet, certains ont un comportement d’achat très rationnel. Ils cherchent à payer le prix le plus bas sans porter beaucoup d’importance aux tendances. Au contraire, d’autres paieront un bien d’occasion plus cher que le prix neuf pour obtenir un modèle particulier. Les faibles prix motivent aussi des consommateurs avec une logique consumériste qui leur permettra d’obtenir davantage de biens. D’autres consomment au sein du marché de l’occasion dans un but éthique et écologique pour limiter la surconsommation (Roux, 2004; Xerfi, 2019).

Les freins des consommateurs vis-à-vis du marché de l’occasion

L’étude des freins est importante. En effet, ces derniers peuvent prendre le dessus sur les motivations. Il faudra ainsi essayer de les réduire au maximum. Xerfi Percepta (2019) en identifie trois types potentiels liés à la consommation de produits d’occasion :

Les caractéristiques du produit

Premièrement, les freins liés aux produits concernent l’état, la qualité et la durabilité. Ce sont des éléments peu évaluables en ligne sur ce marché. Les autres problèmes liés aux produits sont le manque d’informations à propos du produit et la contagion physique négative (qu’il s’agisse de microbes de germes ou d’une contagion symbolique).

Les circuits de distribution

Deuxièmement, les désagréments liés aux circuits de distribution sont le manque de garanties, l’impossibilité de tester et les faibles responsabilités du vendeur particulier. Ces éléments constituent un risque. Ensuite, les biens retrouvés sur ce marché sont aléatoires. En d’autres termes, la recherche peut être longue et cela constitue un frein important lorsqu’il s’agit d’un besoin urgent. Enfin, les modalités de récupération peuvent être compliquées. Le bien peut être éloigné et la livraison peut sembler trop coûteuse par rapport à la valeur estimée du bien, trop longue ou trop risquée.

Les freins sociaux

Pour finir, certains consommateurs ressentent une peur d’être jugés à cause de la connotation négative de ce marché.

L’essor de l’économie circulaire en France : le succès des acteurs du marché de la seconde main

Une success-story qui a révolutionné le marché de l’occasion : leboncoin

“Le bon _____ pour tous”, campagne de communication pour leboncoin.

Leboncoin est un site gratuit de petites annonces géolocalisées, créé en France en 2006. Il appartient au groupe norvégien Adevinta. À cette époque, leboncoin n’avait que deux salariés et n’imaginait pas le succès qui l’attendait. Aujourd’hui, leboncoin est une plateforme généraliste positionnée sur de nombreux marchés : la publicité, les biens de consommation, les véhicules, l’immobilier, les services, l’emploi et les vacances. Leboncoin est considéré comme la référence du marché de l’occasion avec 28,5 millions de visiteurs uniques par mois selon Médiamétrie.

« un bien sur deux à vendre ou à louer est présent sur Leboncoin »

Antoine Jouteau, 2019

Malgré une baisse de l’audience et des performances de la plateforme pendant la période où la France était en confinement (du 17 mars au 10 mai 2020), leboncoin a battu nombreux de ses records depuis le 11 mai, la date du déconfinement. En effet, le nombre d’annonces en ligne a dépassé les 30 millions. De plus, il y a eu une journée à 19 millions de visites et la moyenne journalière s’élevait à 17 millions de visites. C’est aussi un record d’utilisation pour le paiement sécurisé en ligne, une fonctionnalité récente.

La montée en puissance de la nouvelle reine de la seconde main : Vinted

Page d'accueil du site Vinted.fr, plateforme collaborative du marché de l’occasion
Page d’accueil du site Vinted.fr, plateforme collaborative du marché de l’occasion

Vinted est une plateforme collaborative de seconde main qui met en relation les particuliers dans le but de vendre ou d’échanger leurs vêtements et accessoires de mode. Le site est né en 2008 en Lituanie. Il est présent en France depuis 2013. Depuis son lancement, Vinted est monté en puissance. Les chiffres sont aujourd’hui fulgurants et ne cessent de croître. Par conséquent, le site est devenu un acteur absolument incontournable de la seconde main dans le pays. En effet, en France, la plateforme ne compte pas moins de 10 millions d’utilisateurs. En moyenne, 400 000 articles y sont publiés quotidiennement et 2,2 transactions sont réalisées chaque seconde. En 2018, Vinted a alors réalisé un chiffre d’affaires de 24,8 millions d’euros sur les marchés français, espagnol et belge. En novembre 2019, l’entreprise est devenue une “licorne”, ce qui signifie que sa valeur est supérieure ou égale à un milliard d’euros.

Les réponses des acteurs du marché du neuf face à l’engouement des consommateurs pour l’occasion

«L’offre d’occasion s’alimente du « recyclage » des produits neufs. […] La certitude de reprise des produits usagés […] constitue une incitation à l’achat sur le marché du neuf»

Bauhain-Roux et Guiot, 2001

Ces deux marchés sont perméables, c’est-à-dire que le marché de l’occasion est vu comme un marché “parasite” qui s’alimente du marché du neuf. Cette menace pour les acteurs du marché du neuf est ainsi à transformer en opportunité.

Rendre le neuf plus attractif

Selon Bauhain-Roux et Guiot (2001), une des premières alternatives des acteurs du marché du neuf face au marché de l’occasion est de rendre le neuf plus attractif. 

Pour cela, il est possible de :

  • miser sur des services absents du marché de l’occasion (conseils, garanties, installations,…),
  • développer des gammes de produits à petits prix pour attirer les consommateurs ayant des motivations économiques,
  • rééditer des produits anciens appréciés et rares pour récupérer les consommateurs avec des motivations hédoniques,
  • orienter son axe de communication via une “valorisation de l’achat neuf par rapport à l’achat d’occasion” (Roux, 2004).

Intégrer une offre d’occasion à leur offre

L’autre solution est d’intégrer l’occasion à leur offre. Il peut s’agir de créer des événements temporaires et ludiques autour de la seconde main ou bien d’intégrer une plateforme et des biens d’occasion à leur offre permanente. Pour cette dernière option, il est possible d’utiliser ses propres ressources internes ou faire un partenariat. (Xerfi Percepta, 2019).

Seconde Histoire de Cyrillus

Seconde Histoire de Cyrillus est un bon exemple. En 2017, Cyrillus a lancé “Seconde Histoire”, sa plateforme collaborative de revente de vêtements d’occasion de sa marque. Cette initiative est un levier de fidélisation vis-à-vis de sa clientèle. En effet, le vendeur a la possibilité d’encaisser le montant de la vente directement ou sur une e-carte cadeau avec un montant abondé de 50% du total du prix la vente. Par conséquent, les vendeurs sont incités à choisir cette option et acheter à nouveau dans le magasin puis revendre une fois qu’ils n’utilisent plus le bien. C’est un cercle vertueux.

Sezane et son opération avec Videdressing

Certaines marques préfèrent s’associer à des plateformes collaboratives de vente de produits d’occasion afin de promouvoir la mode de seconde main et leurs valeurs éthiques, durables et écologiques. C’est le cas de Sezane qui s’est associé à Videdressing en 2019 pour une opération commerciale temporaire. Cette dernière consistait à inciter les utilisateurs de Sezane à vendre leurs articles sur la plateforme pour ensuite récupérer un bon d’achat utilisable sur le site de Sezane. Sezane reversait également une partie de la somme à un programme solidaire.

Apple et son offre d’appareils reconditionnés

Enfin, Apple s’est également positionné sur le marché de l’occasion. En effet, ce dernier propose sur sa boutique en ligne depuis septembre 2019, des appareils reconditionnés, certifiés Apple et garantis 12 mois. Ainsi, Apple reprend la main sur ce marché en misant sur des garanties et des certifications afin de redevenir le choix numéro un. C’est une stratégie intéressante étant donné qu’il s’agit d’un achat assez risqué.

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