La transformation numérique a entraîné une nouvelle ère de concurrence. L’arrivée d’Amazon a bousculé nos habitudes d’achats. L’introduction de la distribution de biens de consommation courante en 2012, puis celle des produits alimentaires en 2015. Le phénomène s’est encore accéléré avec la pandémie de la COVID-19, avec l’apparition du Quick commerce. 

Les consommateurs sont de plus en plus exigeants. Ils veulent être en mesure de commander n’importe quoi, n’importe où, n’importe quand. Les magasins physiques sont confrontés à une pression croissante. Et essaye de s’adapter à la nouvelle norme des consommateurs en proposant des expériences d’achats plus personnalisées et plus intuitives. A cela s’ajoute également le besoin des consommateurs d’être livré le plus rapidement possible. Les entreprises doivent s’adapter encore plus rapidement qu’auparavant si elles veulent rester compétitives dans le monde d’aujourd’hui.

Après les restaurants sans table, les magasins sans clients

Tout d’abord le quick commerce fait référence au commerce en ligne qui intègre deux facteurs clés : la rapidité (“en 15 min chez vous”) et la livraison à domicile. 

Le secteur de la livraison de repas à domicile était le premier à offrir ces services de livraison ultra rapide. Nous avons vu apparaître à partir de 2017 les dark kitchens ou ghost kitchen. Ce sont des cuisines de restaurants partagées sans table, destinées uniquement aux livraisons et au click & collect. Ces structures sont des temples de la rationalisation des coûts car les marges sont faibles.

Depuis fin 2020, ce modèle s’est étendu au service de livraison des courses à domicile. 8 acteurs se partagent le marché de la distribution express de vos courses France : Cajoo, Flink, Gorillas, Getir, Zapp, Dija, Bam Courses et Gopuff . Il achètent leur marchandise alimentaire et non alimentaire est achetée auprès des grandes enseignes. Celle-ci est ensuite stockée dans de petits centres logistiques appelés dark stores. Chaque dark store fait intervenir plusieurs livreurs, selon sa taille. Un livreur ne dépend que d’un seul dark store contrairement aux livreurs des agrégateurs Uber Eats et Deliveroo. 

les dark stores au coeur des grandes villes

Ce concept se développe exclusivement dans les grandes agglomérations (Paris, Lyon, Marseille…). Le modèle réside tout d’abord dans la capacité de ces stores à livrer dans un rayon de 15 minutes, le maximum de clients potentiels. Ce modèle est également associé à une stratégie de coûts. Ils tirent leur rentabilité grâce au volume de livraison car les paniers moyens sont peu élevés avec de faibles marges. 

Cette stratégie agressive entraînera fatalement une réduction du nombre d’acteurs dans le secteur tout comme ce fut le cas pour les acteurs de la livraison de repas. 

“Aujourd’hui, huit entreprises ont lancé leur offre à Paris. Or il n’y a de la place que pour trois ou quatre”, glisse Henri Capoul, co-fondateur et dirigeant de Cajoo.

“Livraison express: Cajoo s’allie à Carrefour et lève 40 millions de dollars pour doubler ses rivaux”, LSA, le 02/09/2021

StratégieS d’alliance entre la grande distribution et les quick commerçants

En 2021, l’activité du Quick commerce a affiché une croissance de +86% par rapport à 2020 d’après l’étude du cabinet d’analyse IRI publié en janvier 2022. Le marché représente 122 millions d’euros et les perspectives de croissances sont énormes. C’est la raison pour laquelle, les enseignes de la grande distribution essaient de trouver de nouvelles façons de rester compétitives et de s’assurer qu’elles disposent d’un modèle commercial durable à l’avenir. Une façon d’y parvenir est de s’associer à des pionniers du secteur qui peuvent offrir leur expertise en logistique et en gestion de la chaîne d’approvisionnement. 

Une collaboration qui profite aux deux parties

Carrefour a investi 40 millions de dollars dans Cajoo en 2021 et a lancé dans la foulée ”Carrefour Sprint” en partenariat avec ce dernier et Uber Eat. Les bénéfices sont multiples pour l’ensemble des partenaires, tout d’abord cela permet à Carrefour de profiter du réseau de Cajoo et de la visibilité de l’application Uber eats. 

Pour Cajoo, l’avantage principal est de prendre de l’avance sur ses concurrents en termes de rentabilité grâce à l’augmentation de la marge. Puisqu’au lieu de s’approvisionner directement chez les grands groupes, Cajoo se fournit de chez Carrefour à un prix renégocié à la baisse. Carrefour partage avec eux les données sur les habitudes de consommation de ses clients par zone géographique, ce qui leur permet d’optimiser les stocks de leurs dark stores. 

Casino est entré au capital de l’allemand Gorillas en 2021. Gorillas dispose déjà d’une vingtaine de dark stores dans l’Hexagone. Cette alliance a permis à Gorillas d’accélérer ses ouvertures de magasins et de garder la position de leader du Quick Commerce en France selon Fox Intelligence By NielsenIQ.

Les contraintes du déploiement des dark stores sur tout le territoire

Le modèle a été testé dans des villes de plus de 500 000 habitants. Le concept a depuis été étendu aux zones suburbaines de 250 000 à 500 000 habitants. Là où les distances à parcourir sont plus faciles à gérer, mais où la demande totale peut encore être importante. Pour fonctionner correctement, les darks stores nécessitent une population dense de consommateurs et un niveau élevé d’adoption du numérique. Ces deux conditions qu’on retrouve uniquement dans les grandes villes. Ce qui explique pourquoi le modèle de commerce rapide est actuellement limité aux grandes villes. 

Les mairies protègent leur centre-ville

Le déploiement rapide de ces nouveaux magasins sans clients a pris de court les grandes villes. Récemment la mairie de Paris a convoqué certaines structures de quick commerce qui ne respectent pas le code de l’urbanisme. Ils ont transformés des locaux commerciaux destinés à accueillir des magasins. en entrepôts logistiques. La ville risque en conséquent de perdre en attractivié pour les touristes et les riverains. En outre les petits commerces de proximité peuvent être en danger.

D’autres villes comme Lyon et Rouen tentent de limiter leur expansion pour protéger leur centre-ville. En conséquent es quick commerçants devraient être vigilents à se conformer aux normes d’urbanismes sous peine d’impacter leurs projections de croissance.  

Vers un modèle hybride ?

L’extension du quick commerce à d’autres types de clients dans des zones moins peuplées nécessiterait un investissement important en logistique. Cette approche augmentera les délais de livraison, ce qui la rendra moins attractive pour les clients. Le jeu des alliances entre les distributeurs traditionnels et les quick commerçants prendra de l’ampleur. Dans les prochaines années, nous pourrions voir se développer des modèles hybrides conciliant magasin physique et livraison rapide comme c’est déjà le cas en Chine. Des entrepots optimisé dour une livraison de courses en moins de 30min. Situés à côté des supermarchés, automatisé et doté d’un personnel dédié. Tel est le futur du quick commerce.